Maître Anthoine Guyot
Aujourd’hui, c’est à nouveau les circonstances de la mort d’un de mes ancêtre dont je vais vous parler.
Notre héros malheureux du jour est maître Anthoine Guyot (Sosa 5902). Laboureur de son état, il se marie à Marie Dumoustier le 14 mai 1654 en la paroisse Saint Marcel de la ville de St Denis (93). Ils ont 8 enfants qui naissent en majorité à Gennevilliers où habite le couple. A cette époque, Gennevilliers n’a rien à voir avec la grosse ville de banlieue que nous connaissons actuellement avec ses plus de 46000 habitants. C’est un petit village avec moins de 1000 habitants dont une majorité de vignerons.
Le procureur fiscal de la seigneurie de Gennevilliers
Anthoine est un personnage important de ce village, car il est le procureur fiscal de la seigneurie de Gennevilliers. Cette charge semble être familiale. En effet, à la naissance de sa fille Jeanne, le 4 septembre 1666, le mari de la marraine de cette dernière est maìtre Jean Guyot, procureur de la seigneurie de Gennevilliers, sans doute le père, l’oncle ou le frère d’Antoine.
Sous l’ancien régime, le procureur fiscal est l’officier en charge de représenter le ministère public auprès du tribunal seigneurial et d’engager les poursuites. Il représente le seigneur et les particuliers.
L'acte de sépulture
Lire les registres du XVIIe siècle n’est pas chose aisée pour un oeil non habitué.
Il est important de se former à la paléographie pour être à l’aise avec ces écritures anciennes. Pour l’acte de sépulture d’Anthoine, l’écriture est plutôt régulière et les 3/4 des mots sont facilement identifiables, mais certains que je ne connaissais pas à l’époque m’ont posé difficulté. J’étais désireux de mieux comprendre cet acte dans lequel j’ai très vite compris que le prêtre, tel un journaliste, nous faisait une description détaillée de la mort de notre pauvre Anthoine. Pour avoir une transcription exacte, j’ai fait appel au groupe facebook «Paléographie (aide bénévole)» et l’un de ses animateurs, le brillant paléographe Baptiste Etienne m’en a fourni la transcription. La voici dans le français de l’époque:
« Du 30 juin est mort m(ais)tre Anthoine Guyot, procureur de seigneurie de ce lieu, sa mort a esté soudaine et imprevue, dechargeant son harnois chargé du fouyn, quelques bottes tomberent qui firent frayeur aux chevaulx, qui s’enfuirent, il tomba de dessus sondit harnois une des roues luy passa sur la teste qui la lui escrasa et mourut sans parler tout à l’instant, le lendemain il fut enterré en l’eglise de ceans en p(re)sance d’Anthoine Guyot, son filz, et de Nicolas Devicque, marguiller »
Pour mieux comprendre, quelques définitions:
Un marguillier est un laic, chargé de la construction et de l’entretien de l’église, de l’administration des biens de la paroisse (terres, locations de terres, écoles, rentes et impôts), de veiller à l’entretien des locaux, de tenir le registre de la paroisse et de préparer les affaires qui doivent être portées au conseil.
Le harnois: il y a plusieurs sens à ce terme. Ici, il s’agit de la charette.
L’église du céans signifie l’église de ce village.
En français contemporain
Si nous traduisons dans un français plus contemporain: « Le 30 juin est mort maître Anthoine Guyot, procureur de seigneurie de Gennevilliers. Sa mort a été soudaine et imprevue. Déchargeant sa charette chargée de fouin, quelques bottes tombèrent qui firent peur aux chevaux, qui s’enfuirent. Il tomba de dessus sa charette et une des roues lui passa sur la tête qui la lui écrasa. Il mourut sur le coup sans pouvoir prononcer une parole. Le lendemain il fut enterré dans l’église du village en présence d’Anthoine Guyot, son fils, et de Nicolas Devicque, marguiller»
Cette description, si terrible soit-elle, nous permet de revivre quelques siècles plus tard le terrible accident qui a provoqué la mort de Maître Anthoine Guyot. Et vous, avez-vous eu l’occasion de découvrir un acte où le prêtre s’autorise à être plus descriptif qu’à l’habitude?
1 commentaire
Christelle · 8 novembre 2019 à 14 h 40 min
Pauvre homme ! Mais d’un autre côté quelle chance d’avoir tous ces détails.